ISTANBUL – Le procès contre l’éminente figure turque des droits civiques Osman Kavala a repris lundi, le 1 539e jour de sa détention provisoire, sans sa participation.

L’audience a lieu car le délai du 19 janvier fixé par le Conseil de l’Europe pourrait déclencher une procédure d’infraction. La Cour européenne des droits de l’homme a jugé en 2019 que les droits de Kavala avaient été violés et a ordonné sa libération. Mais la Turquie a refusé à plusieurs reprises de le faire, le plus récemment lors d’une audience fin décembre.

Le philanthrope Kavala, qui se trouve à la prison de Silivri près d’Istanbul, a déclaré en octobre qu’il n’assisterait plus au procès par vidéoconférence parce qu’il n’avait plus foi en l’obtention d’un procès gratuit.

Kavala, 64 ans, est accusé d’avoir financé des manifestations anti-gouvernementales à travers le pays en 2013 et d’avoir aidé à orchestrer une tentative de coup d’État trois ans plus tard. Il nie les accusations, qui entraînent la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle.

Il a été acquitté en février 2020 des accusations liées aux manifestations du parc Gezi en 2013. Alors que les partisans attendaient sa libération, Kavala a de nouveau été arrêté pour de nouvelles accusations. L’acquittement a ensuite été annulé et lié à des accusations liées à la tentative de coup d’État de 2016.

Ce procès fait maintenant partie d’une affaire combinée impliquant 51 autres accusés, dont des supporters du club de football de Besiktas qui ont été acquittés il y a six ans des accusations liées aux manifestations de Gezi avant que cette décision ne soit également annulée.

Taksim Solidarity, un groupe qui défend le petit parc Gezi dans le centre d’Istanbul, a déclaré avant l’audience que les manifestations pacifiques de 2013 fondées sur les droits constitutionnels et exigeant la démocratie ne pouvaient pas être ternies par le pouvoir judiciaire.

Récemment, le cas de Kavala a également déclenché une crise diplomatique entre la Turquie et 10 pays occidentaux, dont les États-Unis, la France et l’Allemagne, après avoir demandé sa libération.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan dédaigne ouvertement Kavala, l’accusant d’être la “jambe turque” du philanthrope milliardaire américain George Soros, qui, selon Erdogan, a été à l’origine d’insurrections dans de nombreux pays. Il a menacé d’expulser des émissaires occidentaux en octobre pour ingérence dans les affaires intérieures de la Turquie.

La décision de 2019 de la Cour européenne des droits de l’homme a déclaré que l’emprisonnement de Kavala visait à le faire taire ainsi que d’autres défenseurs des droits de l’homme et n’était pas étayé par des preuves d’un crime.

Le Conseil de l’Europe, un bloc des droits de l’homme de 47 membres, a notifié à la Turquie en décembre son intention de porter l’affaire devant un tribunal pour déterminer si la Turquie refusait de se conformer aux décisions finales, qui sont contraignantes. Il a appelé la Turquie à libérer immédiatement Kavala et à conclure sans délai la procédure pénale. Il a demandé à la Turquie de présenter ses vues avant le 19 janvier.